L’intelligence artificielle générative d’image (IA) est arrivée dans nos vies comme une bourrasque. Tout à coup avec quelques mots, on s’est mis à créer des images de toutes sortes. Certains ont trouvé cela amusant, d’autres ont vu cela comme la mise à mort de l’art, et d’autres encore l’ont jugé comme une bulle sans lendemain. Pourtant, l’IA générative d’image est loin d’être un effet de mode ou un outil qui se résume à un descriptif. L’IA générative d’image est aussi importante que la photographie l’a été en son temps. Hier la photographie, avant d’être un art, était une façon de saisir la réalité à un moment donné comme la peinture l’a fait pendant des siècles. Puis comme pour la peinture elle est devenue un outil d’expression pour les artistes. L’image n’était plus uniquement le reflet de la réalité, elle exprimait un regard différent sur le monde, sur les objets, sur les gens. Les artistes de la photographie ont réussi à sublimer la réalité ou l’ont réinventée à travers leurs arts qui, ne l’oublions jamais, se résument avant tout à des habiletés techniques. Leur sensibilité artistique se traduit par leur manière de regarder les choses. De ce fait, l’artiste photographe ne crée rien comme le peintre ou le sculpteur. Il utilise un boîtier, s’aide de lumières pour apporter un regard différent. Parfois, son coup de génie n’est que le résultat de sa spontanéité. Le fait d’avoir su saisir au bon moment un événement, un regard, un sourire ou encore une lumière. Pour autant, le photographe ne crée rien. Dans ce cas, pourquoi refuser à l’IA son droit de devenir un outil de création comme la photographie ? Plus encore que la photographie, l’IA nécessite des mots et pas n’importe quels mots et pas dans n’importe quel sens, et pas avec n’importe quelle ponctuation pour faire apparaître l’œuvre. Plus encore, les modèles utilisés par l’IA sont nombreux et chacun d’eux permet d’obtenir une représentation différente de ce que nous avons écrit. Les modèles c’est plus qu’une palette de peinture, plus que des bobines de film, c’est une bibliothèque avec ses thèmes, ses couleurs, ses lumières et ses sujets qu’il faut apprendre à exploiter. Mieux encore, comme les outils numériques ont enrichi les outils des photographes leur offrant une liberté qu’il n’avait pas eue par le passé, l’IA possède un nombre d’outils que peu de gens connaissent actuellement et qui permettent de manipuler les images de manière époustouflante. L’IA ne se résume pas à Midjourney, Dalle ou Copilot qui sont pour l’image ce qu’étaient les boîtiers photo bon marché ou jetables. Aujourd’hui, il existe des outils plus sophistiqués pour prendre en main l’IA et faire d’elle l’outil des artistes de demain comme le fut la photographie. Dans cette optique, j’ai passé des mois à tenter de dépasser l’aspect technique de l’IA pour qu’elle devienne mon pinceau, mon outil de travail, ma manière d’exprimer ma vision du monde, mes sentiments, et plus généralement ma créativité. Pour ce faire, il a fallu comprendre ce qui se cache derrière ces nombreux outils et apprendre comment les images sont générées. J’ai développé aussi des techniques de travail. Après le travail d’analyse et de compréhension comme hier d’autres le firent pour comprendre tous les principes de la photographie, j’ai cherché à dépasser les images du réel ou les images fantastiques et extravagantes qui déferlent sur le web. Ma démarche a été de générer de l’émotion avec les formes et les couleurs. J’ai ainsi développé des techniques pour trasmettre des émotions avec l’IA afin que l’image créée conduise à l’évasion, à l’apaisement, ou encore à la rêverie. Jouer avec les couleurs semblait un défi, car l’IA ne maîtrise pas toujours parfaitement les couleurs qui tendent facilement à déborder. Il a donc fallu développer des techniques pour créer des palettes de couleurs pour mélanger des formes, pour donner du mouvement et du dynamisme à mes œuvres. Pour ce faire, il a fallu apprendre à jouer non seulement avec les mots, mais aussi savoir se servir de ce que nous offrent ces mots pour les mélanger avec d’autres mots et inventer une nouvelle image sans jamais avoir recours à des outils de traitement d’image comme Photoshop. L’IA est un outil à part entière pour me permettre de créer des œuvres personnelles qui traduisent mes émotions et les partager avec les autres.
Harry Fabre – Digital Artist
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